Choisir son thé

C’est une étape importante qui laisse souvent désemparé : variété apparemment infinie de thés, brouhaha médiatique autour des “meilleurs” thés, revendeurs plus ou moins sérieux… Voici quelques astuces pour prendre une décision simple et rapide.

Anticiper le contexte de dégustation

Il est dommage d’investir dans un thé haut-de-gamme si vous n’avez que quelques minutes devant vous, ou d’opter pour un thé vert si vous ne pouvez pas gérer la température de l’eau. L’idée est de savoir ce qu’est un bon thé pour soi, à un moment précis : petit-déjeuner, pause au bureau, compagnon de travail…

  • Pour se réveiller : un thé noir ou un thé vert contiennent autant de caféine l’un que l’autre, mais chaque métabolisme réagit mieux à l’un ou l’autre – il faut essayer. La panacée reste le matcha, un thé vert en poudre très concentré.
  • Pour se détendre : un thé contenant peu de théine comme le oolong et le thé blanc, voire une infusion comme le rooibos ou les tisanes de simples (attention à la menthe qui peut être stimulante).
  • Pour un moment sur le pouce : un thé noir ou un thé vert, qui infusent rapidement et ne sont généralement pas faits pour être réinfusés.
  • Pour une longue après-midi : un thé réinfusable dont les facettes gustatives évoluent, comme un thé oolong ou un thé sombre.

Varier les fournisseurs

Il est confortable de se fournir au même endroit, que ce soit au supermarché (où l’offre s’est beaucoup améliorée !) ou dans une boutique spécialisée avec laquelle on a noué une relation de confiance. Aller se renseigner dans différentes boutiques ou sur Internet permet cependant de découvrir d’autres horizons : même si on ne cherche rien en particulier, c’est une bonne habitude de comparer les prix, les niveaux d’information, la vision des marques… et de se renseigner en posant ses questions à différents professionnels. Avec l’expérience, on retiendra non pas une mais une multitude de maisons favorites selon ses envies. Préférer les vendeurs :

  • Qui permettent d’acheter en petites quantités (50g et moins) pour goûter.
  • Qui peuvent dire précisément quand le thé a été récolté / fabriqué et d’où il vient.
  • Qui répondent honnêtement même quand ils ne savent pas.

3- Ecouter ses envies

Vous avez lu que le thé vert est bon pour la santé mais vous n’aimez pas le thé vert ? Rassurez-vous : tous les thés possèdent des bienfaits similaires, et la première vertu de cette boisson est de vous offrir un moment de détente et de plaisir qui va naturellement libérer des molécules positives (sérotonine, dopamine). Le thé incite à vous hydrater tout au long de la journée, facilitant votre métabolisme. Sentez-vous libre de céder à un coup de coeur.

 

L’importance de la qualité de l’eau

Le goût du thé dépend de la qualité du thé et de l’eau utilisée pour son infusion. L’idéal serait de préparer chaque thé avec l’eau de la région d’où il provient, ce qui semble difficile. En France, la qualité de l’eau du robinet varie d’une région à l’autre : elle contient plus ou moins de chlore, de calcaire et de minéraux qui ont tendance à dénaturer le goût du thé. Laisser reposer l’eau 10 minutes suffit à ce que le chlore s’évapore.

Au 8e siècle, Lu Yu, auteur d’un des premiers ouvrages consacré au thé attachait une grande importance au choix de l’eau : « Pour préparer le thé, les meilleures de toutes sont celles qui s’écoulent des stalactites ou qui ruissellent doucement sur des lits de roches.» (In Le classique du thé)

Un peu de science (mais pas trop)

Pour bien choisir son eau, il faut connaître sa dureté, c’est-à-dire sa minéralisation (teneur en calcium et magnésium). L’eau ne doit être ni trop dure, ni trop douce, afin d’exprimer au mieux le goût du thé. C’est donc important pour les thés d’origine, où l’on souhaite valoriser les traits gustatifs d’un terroir, en minimisant le risque de « rater » l’infusion (trop amer, trop astringent, trop fade…). Il est recommandé de les préparer avec une eau possédant un résidu à sec (indicateur de sa minéralisation) entre 120 et 220mg/l. Cette information est clairement isolée sur l’étiquette de chaque bouteille d’eau. Certains thés d’origine particulièrement délicats nécessitent une eau ayant un résidu sec inférieur à 100mg/l. C’est le cas des Darjeelings, des thés blancs ou jaunes et de certains thés verts (liste non exhaustive). Son pH doit être inférieur à 7, c’est-à-dire légèrement acide.

Les thés parfumés sont moins sensibles à la qualité de l’eau que les thés d’origine grâce aux arômes ajoutés, mais on peut retenir la possibilité de changer d’eau si on veut adoucir le thé ou au contraire lui donner plus de caractère.

Quelle eau choisir ?

1- L’eau en bouteille, bien que peu écologique, possède deux avantages : on peut en changer facilement pour s’adapter au thé choisi, et elle notifie clairement sur l’étiquette les informations nécessaires (résidu à sec et pH).

A savoir : les eaux de source ne sont pas meilleures que les eaux minérales (et inversement), car l’appellation distingue seulement la stabilité (minérale) ou la variabilité (source) de la teneur en minéraux.

2- Les carafes filtrantes diminuent la quantité de minéraux. Certains palais trouveront que les charbons actifs filtrants donnent un goût à l’eau. Le filtre à eau, posé directement sur le robinet est une autre solution mais s’avère assez onéreuse.

Pour se convaincre de l’importance de la qualité de l’eau, rien de tel qu’une dégustation comparée d’un thé sensible (exemple : thé vert de printemps) infusé dans deux eaux différentes. Pour ce test, on choisira une eau très minéralisée (exemple : Evian) et une eau faiblement minéralisée (exemple : Mont Roucous, Montcalm, Volcania). On utilisera la même quantité de thé, d’eau et le même temps d’infusion. Les palais sensibles sentiront une différence entre les deux alors que d’autres n’en percevront aucune : c’est une simple question d’habitude. Au final, l’eau idéale pour préparer un thé dépend de l’appréciation de chacun.

 

Infuser son thé

Trois facteurs sont à prendre en compte pour réussir son thé : le temps d’infusion, la température de l’eau et la quantité de thé utilisée. Un temps d’infusion trop long, une eau trop chaude pour le type de thé ou une quantité de thé trop élevée risque de trop accentuer les tanins et risquent de rendent le thé amer.

Quand on déguste un thé pour la première fois, il est donc intéressant de suivre quelques règles. Qu’il s’agisse de thé en sachet ou en vrac, des indications relatives au temps d’infusion et à la température sont mentionnées sur la boîte ou le paquet. Parfois, ces indications varient pour un même thé d’une marque à l’autre. L’amateur de thé doit avant tout prendre en compte la nature du thé.

Cf. tableau récapitulatif ci-dessous

Adapter la température de l’eau selon le thé

Toutes les couleurs de thé ne réagissent pas de la même façon à la température : un thé vert et un thé noir ne seront par exemple pas infusés à la même température. Il faut donc adapter la température de l’eau au thé afin d’exprimer au mieux ses saveurs.

Une bouilloire électrique à température réglable permet d’obtenir simplement des résultats précis. S’il reste de l’eau dans la bouilloire après la préparation du thé, il est déconseillé de la réchauffer une seconde fois car elle contiendra moins d’oxygène, nécessaire au développement des composés aromatiques.

Si on ne peut pas choisir la température de l’eau, il est bon de savoir que l’eau perd en moyenne 10°C lorsqu’on la transfère d’un récipient à un autre. On peut ainsi faire baisser la température d’une eau trop chaude, ou à l’inverse réchauffer le mug ou la théière destinée à l’infusion pour éviter de perdre en température.

Si certaines personnes apprécient leur thé brûlant, il est conseillé de ne pas boire trop chaud pour ne pas abîmer l’oesophage. Comme la perception des saveurs change selon la température, il est intéressant de déguster son thé à mesure qu’il refroidit pour en découvrir différents aspects. Le thé devenu froid est parfois amer, ce qui est normal : cela vient des tanins dont on sent moins le goût (ou l’arôme) à chaud.

Tableau récapitulatif des températures et temps d’infusion pour une préparation à l’occidentale, c’est-à-dire 2 cuillères (4g environ) pour 1 tasse (25-30cL)

Couleur Type de  thé Température conseillée Temps d’infusion conseillé
Noir Thé noir Chinois 95°C 4 à 5 min
Noir Thé noir Indien (Assam) 95°C 3 à 4 min
Noir Thé noir  Darjeeling de printemps 80°C 3 à 3’30 min
Noir Thé noir Darjeeling autre saison 95°C 3 à 4 min
Vert Thé vert chinois de printemps 75°C 4 à 5 min
Vert Thés vert chinois   75°C 3 à 4 min
Vert Thé vert Gyokuro et thés de printemps japonais 50°C 1 à 2 min
Vert Thés verts japonais 70°C 2 min
Bleu-vert Oolong /Wulong peu oxydés 80°C 5 à 6 min
Bleu-vert Oolong /Wulong très oxydés 90°C 4 à 5 min
Blanc Thé blanc 60 à 70°C 5 à 8 min
Jaune Thé jaune 60 à 70°C 4 à 6 min
Sombre Puer cru 80°C  3 min
Sombre Puer cuit 95°C 3 à 5 min
Parfumés Selon le type de thé de base 3 à 4 min

Nb. Chaque amateur de thé baissera ou augmentera la température de l’eau,  laissera infuser plus ou moins longtemps, et rectifiera la quantité de thé selon son palais.

 

Le matériel nécessaire pour bien déguster son thé

Ceux qui ont assisté à une cérémonie du thé japonaise ou chinoise savent que de nombreux ustensiles sont nécessaires. En France, nous avons hérité du teatime à l’anglaise avec la théière, les tasses et soucoupes (ou les mugs venus d’outre-Atlantique) et du sucre. Les méthodes occidentales ou asiatiques ne sont pas meilleures ou pires les unes que les autres, mais correspondent à des habitudes de consommation qui dépendent de la culture, du lieu de vie et du temps disponible. Ainsi, choisir son matériel n’est pas une question d’être puriste ou profane, mais d’être honnête sur ce que l’on attend de sa “pause thé”.

1. Le mug :

Un simple mug équipé d’un couvercle et d’un filtre adapté suffit. C’est le plus pratique et il est utilisable au bureau, en voyage ou à la maison. Un 2e mug permet de transférer une eau trop chaude pour la refroidir (voir les astuces plus bas), et de partager l’infusion avec un collègue !

2. La théière

Très pratique lorsque l’on est nombreux, la grosse théière anglaise laisse croire que le thé est identique quelle que soit la quantité d’infusion réalisée. Mais pour obtenir la même intensité avec 1L ou plus, il faut plus de thé et plus de temps, ce qui fausse les saveurs. Les théières recommandées contiennent 2 à 4 tasses (60cL-85cL), quitte à préparer deux théières à la fois pour des invités nombreux.

> En porcelaine ou faïence image : théière porcelaine

Avantage – C’est le meilleur compromis de poids, rétention de chaleur et solidité. Une seule théière, bien nettoyée après chaque infusion peut suffire pour toutes les familles de thé.

Inconvénient – Le tanin accroche facilement et laisse un dépôt brun après rinçage (le culottage). Il faut donc frotter régulièrement pour l’ôter. Une vieille théière deviendra irrémédiablement culottée et donnera le goût des infusions précédentes aux suivantes.

> En terre cuite image : théière terre

De tradition chinoise, la matériau poreux garde en mémoire les infusions précédentes. Elle est souvent très petite, pour des infusions successives rapides.

Avantage – Pas besoin de la laver !

Inconvénient – Une théière doit être consacrée à une seule couleur de thé, et ne convient pas aux thés parfumés dont les arômes puissants altéreraient les infusions suivantes.

> En verre :

Avantage – On voit l’infusion à travers, ce qui est à la fois joli et pratique, et le verre se nettoie facilement.

Inconvénient – Le verre retient mal la chaleur et est fragile.

> En fonte :

De tradition japonaise, l’intérieur doit être émaillé ; sinon, il s’agit d’une bouilloire.

Avantage – Le métal conserve la chaleur de l’eau plusieurs heures.

Inconvénient – Son poids, en plus du poids de l’eau : à ne pas offrir à des personnes fragiles ou maladroites.

3. Le gaïwan (ou zhong) :

Principalement utilisé en Chine et à Taïwan dans le cadre de la méthode traditionnelle du gong fu cha, il peut néanmoins s’utiliser seul. Le principe est d’infuser plusieurs fois le thé dans une petite quantité d’eau : c’est utile pour les personnes qui veulent goûter l’évolution des saveurs du thé sans en boire trop.

Avantages – Pas besoin de filtre : on dépose directement les feuilles dans le gaïwan, et on filtrera en versant grâce au léger décalage du couvercle. De forme évasée, il est facile à rincer et permet de contrôler l’infusion au visuel.

Inconvénient – Il faut un peu de pratique pour prendre le “coup de main” de verser en décalant le couvercle.

 

Quelques astuces !

Mesurer le thé

On entend souvent la quantité optimale de 2g ou une cuillère à café rase pour 1 tasse, mais la taille de la tasse varie, tout comme la physionomie des feuilles. Il n’y a donc pas de vérité.

  • Pour 25cL, il faut compter une pincée environ ; le goût et l’expérience vous permettront d’affiner les quantités selon le thé, l’ustensile, et le résultat souhaité.

Contrôler la température

  • Un thermomètre de cuisson dans une casserole ou une bouilloire non réglable. A l’usage, vous saurez repérer la température souhaitée à la vue et à l’ouïe.
  • Rajouter de l’eau froide dans l’eau trop chaude, toujours avec le thermomètre.
  • Passer l’eau trop chaude d’un récipient à l’autre pour faire baisser la température.

Mesurer le temps

  • Le chronomètre d’un téléphone portable est très pratique !
  • Un peu fastidieux mais infaillible : compter vos battements cardiaques, sachant qu’au repos, 1 minute = 60 battements.

Rincer ou ne pas rincer ?

  • Rincer le contenant à l’eau très chaude permet une température constante d’infusion, et le débarrasse de tout dépôt ou odeur indésirable.
  • Rincer le thé, c’est-à-dire l’infuser une dizaine de secondes, jeter cette eau, puis commencer l’infusion que vous allez boire, permet de diminuer l’amertume ainsi que la teneur en théine. Toutefois, vous perdez aussi du goût ! Cela vaut donc essentiellement pour les couleurs de thé à infusion longue que sont le oolong et le thé sombre (puerh).

 

La dégustation

Les principes de la dégustation du thé restent méconnus en France, peut-être à cause d’une grande consommation de thé en sachets (85% du thé bu par les Français !) : les sachets contiennent rarement des feuilles entières et ne permettent pas de développer les saveurs aussi librement que dans un filtre. Pourtant, nous avons su développer un véritable art de la dégustation avec le vin et la notion de terroir. Seul souci : les Français ont l’habitude du thé accompagné, lors du petit-déjeuner ou du goûter, et lui accordent rarement un moment d’attention pour lui-même. Comme pour le vin ou tout autre produit fin, déguster le thé implique de prêter attention à nos sens dans un moment de calme.

La vue et les attentes

A mesure que l’on boit différents thés, on peut reconnaître la physionomie des feuilles et espérer certaines saveurs. Pour le même aspect, les feuilles de deux récoltes différentes n’auront pas le même caractère, poursuivant le parallèle avec les cuvées du vin. La vue du thé infusé influence la dégustation consciemment ou non, car on y associe des saveurs issues d’expériences précédentes. On pense par exemple à tort qu’un thé est bien infusé quand la liqueur est foncée, alors que cela dépend de la couleur du thé.

L’olfaction et les indices

On peut humer plusieurs étapes de la préparation : les feuilles sèches, l’infusion en cours, l’infusion prête, les feuilles humides. Cela permet déjà de vérifier les attentes de la vue, et de mémoriser la personnalité du thé.

La richesse du goût

Quand on boit enfin le thé, le sens du goût agrège la rétro-olfaction (les arômes dépassent le faux palais pour atteindre la fosse nasale), le toucher (qui informe de la texture des aliments), et les goûts primordiaux (sucré, amer, acide, salé, moelleux).

Les amateurs et les professionnels possèdent différentes techniques pour maximiser les sensations : certains aspirent bruyamment de l’air en même temps, d’autres “mâchent” la gorgée. L’objectif reste que le thé stimule tous les recoins de la bouche, avec assez d’air pour envoyer les arômes volatils vers la fosse nasale. On est loin du petit doigt levé mais ce n’est pas grave : les codes de dégustation sont différents car on recherche la perception et non la bienséance.

Pour un même thé, plusieurs personnes peuvent ressentir différentes caractéristiques : elles n’ont ni tort ni raison ! Chaque individu associe une perception à des expériences passées et l’interprète pour pouvoir la verbaliser. L’un parlera de note de poire et l’autre de rose, mais les deux auront la même impression de goût sucré avec une texture poudrée. De plus, la sensibilité s’affine avec l’habitude, l’attention, le contexte… Notre goût, c’est notre individualité.

 

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